vendredi 3 décembre 2010

Le Voisin (Tatiana de Rosnay)

Avant d'atteindre la gloire qu'on lui connaît aujourd'hui (Elle s'appelait Sarah), Tatiana de Rosnay a publié son premier roman, Le Voisin, il y a une dizaine d'années. Roman n'est d'ailleurs pas le terme exact. On a affaire à un objet littéraire non identifié, une sorte de thriller domestique, qui transforme le quotidien paisible et morne d'une femme sans histoire en cauchemar pur. 

Colombe passe une bonne partie de ses jours et de nuits seule. Son mari Stéphane est souvent absent, pris par un travail qui le mobilise souvent loin du domicile conjugal. Colombe s'occupe de leurs deux enfants et travaille dans une maison d'édition, où elle exerce le métier frustrant de nègre pour "des cons qui n'ont jamais été foutu d'écrire un livre". Ce métier ne lui convient pas tout à fait, ni la vie de famille qu'elle mène. Docile, elle fait vivre la maisonnée, aime son mari  comme une amante et ses enfants comme une mère, consciente de sa place dans le foyer.

Et puis il y a un déménagement, un nouvel immeuble, et surtout un nouveau voisin dans l'appartement du dessus. Une nuit, alors que le réveil affiche 3:16, les Rolling Stones rugissent une heure durant, en provenance de la pièce du dessus. Idem la nuit suivante, et les nuits d'après, à l'exception de celles où Stéphane dort à ses côtés. 

"Il n'y a plus que ce bruit. Impossible d'y échapper. Impossible de l'ignorer. Colombe se sent violée, investie, souillée. Elle ne peut rien faire d'autre que de le subir. Elle se lève, marche à travers sa chambre. C'est insoutenable. Son sang-froid l'abandonne. 
- Arrêtez, hurle-t-elle au plafond, arrêtez !" 

Le temps passe et une évidence s'installe aux yeux de Claire : le docteur Faucleroy, son mystérieux voisin qu'elle ne parvient jamais à rencontrer, semble avoir juré de la rendre folle par les moyens les plus pernicieux. De nature réservée, Colombe n'a pas d'autre alternative que celle de lutter, à moins de sombrer dans l'hystérie. 

Le Voisin est une œuvre totalement inattendue. Une forme insidieuse d'horreur à domicile, de menace impalpable, de danger toujours imminent, est installée avec brio par Tatiana de Rosnay. D'autant que le véritable objet du livre surprend, mais il faut attendre la fin pour le découvrir. Ce docteur Faucleroy, que l'on ne voit jamais, que l'on entend jamais (si ce n'est à travers sa chaîne stéréo), dont on ignore tout des intentions, et qui pourtant est omniprésent, devient un spectre vivant sur le palier du dessus, qui va à la fois réveiller et éveiller Colombe. Sa situation n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle de la jeune mère dans Rosemary's Baby. A lire les nuits d'insomnie pour plus de plaisir...

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