samedi 11 juillet 2009

Socrate 2.0



Une note brève (et tardive) pour signaler l'article passionnant paru dans Books du sociologue espagnol Joaquin Rodriguez, intitulé Internet rend-il idiot ? Vous le trouverez dans son intégralité en cliquant ici !

jeudi 9 juillet 2009

C'est l'été !


Un court message estival pour vous dire combien l’été sied à la lecture de certains livres. Je me rappelle encore certaines fins d’après-midi de juillet et d’août, étendu sur une terrasse à l’heure où la chaleur commence à peine à diminuer, en train de déguster les pages de quelque histoire dans laquelle le soleil était tout aussi rayonnant qu’au dessus de ma propre tête.

L’harmonie parfaite entre le livre et son lecteur… Tout le monde a connu cela au moins une fois dans sa vie, et si ce n’est pas le cas, essayez-donc les récits suivants, je vous les livre pêle-mêle.

J’ai par exemple devant moi un vieil exemplaire des Lettres de mon Moulin. Un petit format, idéal pour la saison car il s’emmène partout, dont les feuilles commencent à se couvrir d’un joli jaune pâle. Le premier conte, sobrement intitulé Installation, est le préambule rêvé de tous vacancier qui n’aspire qu’à deux choses : le calme et le ciel bleu.

« Ce sont les lapins qui ont été étonnés !… Depuis si longtemps qu’ils voyaient la porte du moulin fermée, les murs et la plate-forme envahis par les herbes, ils avaient fini par croire que la race des meuniers était éteinte […] La nuit de mon arrivée, il y en avait bien, sans mentir, une vingtaine assis en rond sur la plate-forme, en train de se chauffer les pattes à rayon de lune.
Quelqu’un de très étonné aussi, en me voyant, c’est le locataire du premier, un vieux hibou sinistre, à tête de penseur, qui habite le moulin depuis plus de vingt ans. […] N’importe ! Tel qu’il est avec ses yeux clignotants et sa tête renfrognée, ce locataire silencieux me plaît encore mieux qu’un autre, et je me suis empressé de lui renouveler son bail. Il garde comme dans le passé tout le haut du moulin avec une entrée par le toit ; moi je réserve la pièce du bas, une petite pièce blanchie à la chaux, basse et voûtée comme un réfectoire de couvent.

C’est de là que je vous écris, ma porte ouverte, au bon soleil.
Un joli bois de pins tout étincelant de lumière dégringole devant moi jusqu’au bas de la côte. A l’horizon, les Alpilles découpent leurs crêtes fines… Pas de bruit… A peine, de loin en loin, un courlis dans les lavandes, un grelot de mules sur la route… Tout ce beau paysage provençal ne vit que par la lumière ».

Quittons maintenant Alphonse Daudet mais restons en Provence avec Marcel Pagnol. Ceux pour qui le thème de l’eau est indissociable des vacances sont fortement encouragés à lire L’Eau des Collines (en deux parties : Jean de Florette puis Manon des Sources), ou l’histoire d’un drame au pays des sources… et des naïades.

« Lentement, il écarta les tiges grises des clématites, puis les feuilles charnues d’un lierre, et il la vit enfin, celle qu’il cherchait depuis l’aurore, et qui l’avait attiré jusque-là.

Assise au bord d’un grand trou rond, les jambes pendantes vers l’eau, qu’elle égratignait du bout de l’orteil, elle était nue. Une collerette de hâle descendait de son cou vers sa jeune poitrine, ses avant-bras étaient bruns jusqu’au coude et ses jambes jusqu’aux genoux ; mais son torse était d’un blanc de lait, et brillait d’un lumineux contraste avec les gants et les bas mordorés du soleil. […]
Non loin de la bergère, sur la roche brûlante, sa robe sombre et sa chemise brillaient au soleil. Tout près d’elle, un morceau de savon carré, et son petit harmonica. Pensive, la tête baissée, ses cheveux blonds pendant vers sa poitrine, elle balançait toujours ses jambes rondes, et des gouttes brillantes, au bout de son pied, sautaient au soleil ».

Enfin, à l’attention de ceux qui aiment les contes, je propose le K, de Dino Buzzati, un recueil de nouvelles drôles, attendrissantes ou effrayantes, qui ont pour point commun de mettre en exergue l’absurdité de notre condition de mortels et l’inexorable fuite des jours. Extrait de La leçon de 1980, une des histoires les plus absurdes mais aussi les plus justes, qui prouve que l’imagination, quand elle s'en donne la peine, peut avoir le fin mot sur les réalités.


« Excédé à la fin par tant de querelles, le Père éternel décida de donner aux hommes une leçon salutaire. A minuit précis, le mardi 31 décembre 1979, le chef du gouvernement soviétique, Piotr Semionovitch Kurulin, mourut subitement […] Une semaine après, à minuit précis, le mardi 7 janvier, quelque chose qui ressemblait fort à un infarctus, terrassa à table de travail tandis qu’il conférait avec le secrétaire à la marine de guerre, le Président des Etats-Unis, Samuel E. Fredrikson… ».

Je ne vais pas plus loin, vous avez compris la logique. Chaque semaine à minuit, Dieu eut l’idée de faire mourir l’homme le plus puissant de la planète. D’où une course effrénée, un sauve-qui peut général des postes de pouvoir, la défection des dictateurs de peur d’y passer à leur tour. « Six mois ne s’étaient pas écoulés que toute ombre de conflit, même locale, s’était dissipée ».

Chaque histoire est ainsi faite : une trame simple, mais un humour mordant. Chacun y trouvera son compte. Bonnes vacances !