mercredi 27 mai 2009

Petite discussion avec une momie et autres histoires (Edgar Allan Poe)



Le côté fantastique des nouvelles de Poe est sans doute dépassé. Il est d'ailleurs intéréssant de voir comment les procédés visant à frapper l'imaginaire du lecteur du 19e ne conviennent plus au lecteur contemporain : la momie qui se réveille a fait son temps.

Néanmoins, la peur de l'inconnu et les réactions qu'il engendre gardent toute leur actualité. Le puits et le pendule (la meilleure des trois histoires) illustre parfaitement une scène de torture psychologique.
Aux amateurs d'histoires fantastiques, je conseillerais plus volontiers Le Horla, de Maupassant.

lundi 18 mai 2009

Lolita (Vladimir Nabokov)



Sulfureux ? Sans doute.
Soporifique ? Certainement.

Le roman traite de manière explicite de pédophilie, ce qui nous entraîne vers le fameux débat du rapport entre éthique et esthétique. Le thème choisi est on ne peut plus tabou. Le contexte culturel qui est le nôtre permet à l'art de raconter le crime, d'exposer la violence, de se plonger dans la peau d'un tueur, et même de faire l'apologie de la torture, mais la relation physique, sexuelle, entre un enfant et un adulte demeure le non-dit absolu. Du moins, on ne peut la raconter que si elle est explicitement condamnée. Tel n'est pas le cas ici.

C'est donc avec l'esprit quelque peu tourmenté qu'on lit ce livre, et encore plus tourmenté que l'on tente d'en faire le commentaire. Si j'ose délaisser le fond pour commenter la forme (j'entends déjà l'armée des professeurs de français se signer puis hurler au sacrilège !), je dirais que le tout fait vaguement penser à la relation littéraire ratée d'un road-movie interminable, à l'exception de certains passages proprement fulgurants, où la démence et le fantasme du narrateur s'expriment dans un style purement exceptionnel :


"Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon péché, mon
âme. Lo-lii-ta : le bout de la langue fait trois petits pas le long du palais
pour taper, à trois, contre les dents. Lo. Lii. Ta.

Le matin, elle était Lo, simplement Lo, avec son mètre
quarante-six et son unique chaussette. Elle était Lola en pantalon. Elle était
Dolly à l'école. Elle était Dolores sur les pointillés. Mais dans mes bras, elle
était toujours Lolita".


Maurice Couturier, dans son introduction à l'oeuvre (Gallimard, édition 2005), exprime une pensée qui me semble résumer pleinement le débat : "Dans le cas de Lolita, le lecteur d'aujourd'hui est infiniment plus embarrassé que celui des années cinquante. Cela ne remet aucunement en question la valeur esthétique du roman mais démontre, au contraire, qu'il demeure d'une brûlante actualité et d'une troublante beauté. Car il existe une éthique de l'art qui transcende notre morale coutumière, souvent éphèmère..."