jeudi 1 avril 2010

L'attrape-coeurs (J.D. Salinger)


Il ne faudrait jamais lire les commentaires de quatrième de couverture avant d'ouvrir un livre. Au dos de L'attrape-coeurs, on y parle d'un ouvrage "puissant, dense", à la facture "d'une prodigieuse sûreté..." Comment ne pas être déçu après cela ?

Caufield, un adolescent de bonne famille, a de nouveau été renvoyé de son lycée, quelques jours avant Nöel. Avant que la nouvelle ne parvienne à ses parents, il décide de s'offrir quelque jours seul dans New York et de se laisser porter au gré de ses rencontres ou de ses envies. Caufield en a après le monde entier, comme tout adolescent qui se respecte. Sa petite soeur, Phoebé, avec qui il aime "discuter le coup", est la seule à trouver grâce à ses yeux.

La plume de l'auteur est fine : le ton rend parfaitement la pensée d'un écorché vif. Les phrases sont un mélange parfait de naïveté, de cruauté et de poésie. Elles dessinent de façon millimétrée les émois du jeune garçon, qui évolue entre les préoccupations d'un adulte et d'un enfant qui cherche vainement à savoir où vont les canards de Central Park, en hiver, quand le lac est gêlé.

Les mots tombent juste, et sont même parfois cinglants : l'éloge de la digression auquel se livre Caufield me paraît à ce titre tout à fait remarquable :

"Ce que je veux dire aussi, c'est qu'il y a tellement de fois où on sait pas ce qui est le plus intéressant avant de se mettre à parler d'un truc qui n'est pas le plus intéressant. Je veux dire qu'on peut rien y faire. Mais je pense qu'il fait laisser un gars tranquille quand au moins il est intéressant, et puis tout emballé par quelque chose. J'aime bien lorsque quelqu'un est emballé par quelque chose. C'est chouette. Vous l'avez pas connu vous, ce prof, Mr Vinson. Lui et son foutu cours. Par moments, y avait de quoi devenir maboule. Il arrêtait pas de dire d'unifier et puis de simplifier. Tout le temps. Y a des choses, c'est pas possible. Je veux dire, c'est pas possible de simplifier et d'unifier juste parce que quelqu'un le décide".

La remarque est un peu à l'image du livre. Une gigantesque digression, avec un fil rouge, la quête de soi. Peut-être faut-il être adolescent pour vraiment apprécier l'histoire. Il y a quelque chose d'universel dans tout cela, oui, mais on a aussi du mal à se sentir concerné. Cette certitude que l'on est devant quelque chose de beau, mais d'ennuyant tout à la fois, on l'a tous connu au moins une fois. Attachant, mais pas passionant, L'attrape-coeurs laisse un goût d'inachevé...

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