
Des passages légers, des anecdotes, il y en a beaucoup. Mais parfois, derrière les petites histoires des repas du dimanche, se cachent des habitudes lourdes de sens :
"Je n'avais guère plus de huit ou neuf ans. Au cours d'un repas, je taillais une tranche de pain et je replaçais, tout à fait par hasard, la tourte sur le dos. Mon grand-père la remit sur le ventre. Un moment plus tard, je recommençais un peu moins innocemment peut-être mais sans vraiment penser à mal. Mon grand-père remit la tourte à l'endroit d'un geste brusque mais sans rien dire. Je sentais bien qu'il y avait quelque chose qui déplaisait à mon grand-père quand la tourte était sur le dos, mais pourquoi ? Je n'arrivais pas à comprendre. Alors, de propos délibéré cette fois, pour savoir, je retournais la tourte.
Mon grand-père se dressa, le visage empourpré de colère, prit la tourte à deux mains, la retourna et la planqua sur la table avec une violence inouïe.
"Noum dè di, piti, nou dè di" !
Je crus qu'il allait me battre. Lui qui ne jurait jamais, qui jamais ne se fâchait, voilà qu'il était hors de lui. Ma grand-mère et ma petite soeur étaient atterrées.
"Il n'y a que les putains qui gagnent leur pain sur le dos. Tu comprends ? Les putains. Moi je ne le gagne pas couché sur le dos. Tu as compris ?"
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