
Revenons au livre, car le contexte de l'écriture de ce roman n'est guère déterminant, même si on pourrait le croire à première vue. L'oeuvre est intemporelle : aucun repère n'est jamais donné au lecteur. Le narrateur vit retiré du monde, dans un lieu que l'on appelle la Marina. Il se consacre à la lecture et à son herbier. Mais la barbarie ensommeillée des peuples alentours est soudainement réveillée, des profondeurs des bois qui bordent les frontières septentrionales du pays, par les ardeurs guerrières et sauvages de celui que l'on nomme "le Grand Forestier".
Ce livre est d'une beauté parfaite, mais d'un ennui définitif : les métaphores du bien contre le mal, de la barbarie, des instincts primaires des hommes qui s'éveillent au contact de la rumeur, font de ce livre un récit qui assomme son lecteur. On a surtout loué Jünger pour une œuvre qui dénoncerait de façon absolue l'autoritarisme et la dictature. Mais le recul extrême de l'ouvrage, son intemporalité, son déracinement, en font une fable vide de sens, que l'on appliquera aveuglement aux régimes ou aux valeurs que l'on veut critiquer. Le détachement de toute réalité est certes une prouesse littéraire, mais il ne reste que des pages qui ne dénonceront que ce qu'on voudra bien leur faire dénoncer.
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